Grand'Rue (Poitiers (centre-ville)) | Rue, lieu touristique, intéressant

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 Rue, lieu touristique, intéressant
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Malgré ses brillants états de service (une Université renommée, des magistrats municipaux qui traitent pied à pied avec le gouverneur, l’intendant ou les ministres, de fréquents passages des souverains, et surtout près de 25 000 habitants) Poitiers ne fait pas peau neuve en matière d’architecture civile. C’est dire l’importance de cet hôtel, situé dans la Grand’Rue, artère fort ancienne, animée, densément peuplée, dont les maisons se pressent sur des parcelles souvent étroites. Il occupe pour sa part une parcelle qui s’élargit au cœur de l’îlot.


Le corps de ville, la municipalité de ce temps, voue un intérêt constant à l’aménagement de la cité bien que l’urbanisme soit réalisé par les particuliers, Isaïe Brochard en l’occurrence.

Le nom de Rochefort, attaché à l’édifice, est celui d’une seigneurie proche de Mirebeau, que lui apporte sa femme Charlotte des Moulins. Brochard a ses entrées en cour : négociateur en Italie du mariage de Marie de Médicis avec Henri IV, il compte parmi les maîtres d’hôtel du roi et jouit de la qualité de chevalier. Son implantation reste poitevine puisqu’il perçoit des revenus de son fief de la Clielle et exerce la charge d’échevin, après sa nomination à la mairie en 1617.

Il a donc édifié un hôtel, demeure particulière (d’ordinaire réservée à une seule famille) qui implique un certain train de vie et se définit par l’ampleur de son parti architectural. Celui-ci consiste simplement en deux corps de bâtiment que sépare une cour.

Manquait-on de place pour des ailes en retour qui eussent composé le plan en « U » alors en vogue ? L’ancien couvent des Minimes empêchait une extension vers l’Ouest. Les communs, le logis médiéval, ont disparu ; le jardin, qui s’étendait jusqu’à la rue des Carmes, a été amputé.
Le petit logis sur rue est construit avec soin : chaînes d’angle et piédroits des fenêtres appareillés en « harpe » (alternance pierre longue-pierre courte), corniche sur consoles. Les lucarnes, au vigoureux modelé, sont accostées et surmontées de volutes gonflées d’une sève toute baroque, un panache végétal jaillissant même de leur fronton. Une ample arcade donne accès au passage cocher. La tour d’escalier, éclairée par sa double travée de fenêtres superposées, anime la façade sur cour.
Sur le fronton de la lucarne se lisent les initiales enlacées des commanditaires : C pour Charlotte et Y pour Ysaïe.

Le corps principal, implanté à l’écart de l’agitation roturière de la rue, se développe en longueur.
A partir de l’inattendu contrefort sommé d’un lion énigmatique, il est doublé en profondeur par une aile accolée, tournée vers le jardin.
Le rythme de la façade est donné par des travées de fenêtres, distribuées sans excessive régularité, et par des lignes horizontales (les deux bandeaux qui soulignent l’étage, la corniche fermement moulurée).
Les croisées à meneau de pierre (élément qui commence à passer de mode, Louis XIII régnant) et les demi-croisées à simple traverse sont uniformisées par le décor : linteau à « pointes de diamant », chambranle à « crossettes » (le cadre dessine un petit ressaut à sa partie supérieure), allège ornée d’une « table » (le parement de l’appui est traité en saillie). Le style des lucarnes est discrètement baroque : fronton arrondi entaillé d’un fleuron, volutes qui se métamorphosent en feuillages.
Le linteau de la porte est timbré d’un mufle de lion.
A l’origine, cette façade sur cour était moins longue : on notera la qualité de la reconstitution.

A l’intérieur ne subsistent guère du temps de Brochard que les murs de refend, les deux arcades du vestibule, l’escalier en vis (formule éprouvée mais qui n’est plus d’avant-garde), la grande salle sous charpente (remise en état).
L’économie des dedans a été bouleversée au siècle dernier quand l’hôtel est devenu manutention militaire. On saisit mieux l’ampleur et la nécessité des restaurations. Il n’est pas jusqu’au grand escalier du XVIIIe siècle, rescapé d’un sauvetage (un hôtel de la rue Bourbeau démoli par le percement d’une rue).
On relève la fraîcheur des coloris et la maîtrise de la composition (langage des gestes, diagonales qui creusent l’espace, fonds d’architecture...). Les hôtes de céans (la Direction Régionale des Affaires Culturelles) ont aussi remonté une suite de façades à pans de bois et lancé, côté cour, une structure miroitante, inévitable griffe contemporaine
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Coordonnées :   46°34'55"N   0°20'55"E
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Cet article a été modifié il y a 12 ans